La prochaine séance du séminaire du CIPh, « L’entreprise néolibérale et le défi démocratique » aura lieu le lundi 24 avril, de 17h30 à 19h30, salle 255, CNRS Pouchet, 59-61 rue Pouchet, 75017 Paris :
Laurent Baronian (CEPN, Paris XIII),
« La dimension tacite dans les rapports de production de la firme centrée connaissances »
La connaissance organisationnelle tire sa substance des connaissances tacites que le management extrait et réorganise en conformité avec les intentions et buts managériaux au moyen de systèmes d’informations. Le processus de création de connaissances organisationnelles doit donc nous permettre d’unifier les deux dimensions de la firme tenues jusque-là séparées par les théories de la firme concurrentes : la distribution des droits de propriété et la relation d’emploi dont s’occupent principalement la théories des coûts de transaction et la théorie des contrats, et le mode organisationnel spécifique à la création de connaissances, au centre de la théorie fondée sur les ressources ou les connaissances. Mais la firme comme entité organisationnelle implique justement d’abandonner l’idée que le rapport entre managers et employés se résume à la somme de ses relations contractuelles. Si l’on veut conserver la relation d’autorité et d’exploitation sous-jacente à la relation contractuelle, il faut l’introduire dans les conditions et la mise en œuvre elles-mêmes de l’organisation et du contrôle des ressources cognitives de la firme. Le problème de la connaissance dans les firmes s’en trouve dès lors modifié. Il n’est plus de découvrir si son origine réside dans l’individu ou l’organisation, ni même de définir les interactions entre individu et organisation grâce aux outils de gestion. Mais d’identifier et de définir les processus par lesquels la création de connaissances organisationnelles assujettit l’activité cognitive des travailleurs individuels aux intentions et aux buts des managers de la firme capitaliste, et ce, au moyen d’un relâchement apparent de l’autorité formelle du manager.
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L’entreprise néolibérale et le défi démocratique
Massimiliano NICOLI, Luca PALTRINIERI et Muriel PRÉVOT-CARPENTIER
Après avoir posé les deux premières années, les jalons d’une généalogie politique de l’entreprise moderne, et analysé, l’an dernier, la subjectivation néolibérale sous la forme de « l’entreprise de soi », nous aborderons cette année la question des transformations de l’entreprise néolibérale à l’aune de la démocratie. L’âge néolibéral est en effet souvent décrit comme celui du triomphe de l’entreprise, mais quelle entreprise ? Il est possible de constater que les dynamiques économiques qui ont commencé à se développer à partir des années 1980 ont mis en question, voire détruit, le modèle classique d’entreprise à partir de plusieurs points de vue : celui de la progressive financiarisation de l’entreprise et de la prise de pouvoir des actionnaires dans la structure de la gouvernance ; celui la diffusion de la gig economy , du digital labor et plus généralement de nouvelles formes de travail rendues possibles par les plateformes collaboratives remettant en cause le partage entre espace public et privé et par conséquent la forme entreprise elle-même ; celui de l’émergence d’un nouveau paradigme de management de la ressource humaine, lié aux développements de la société de la connaissance et du capitalisme cognitif ; et enfin, celle de la reconfiguration mondialisée des chaînes de production de valeur et l’émergence d’un nouveau paradigme gouvernemental autour de l’organisation logistique. Après avoir dédié la première partie du séminaire aux enjeux inhérents à ces perspectives, enjeux intrinsèquement liés à ceux du travail, nous poserons deux questions. Comment une philosophie politique qui a réfléchi à la question de la démocratisation des entreprises peut- elle aujourd’hui, dans son volet diagnostic ou normatif, prendre en compte ces transformations ? Comment peut-elle également prendre en compte les nouveaux rapports que les individus entretiennent avec le travail dans un cadre de dissolution ou de dissémination de la « forme-entreprise » classique ? À nouveau, cette année, nous privilégierons une approche pluridisciplinaire en invitant des philosophes, des sociologues, des économistes, des juristes.
Prochaine séance : 15 mai, Giorgio Grappi (Università di Bologna).
Pour plus de renseignements sur ce séminaire : http://www.ciph.org/spip.php?page=activite-detail&idevt=569